Frank Cavicchi avait une profonde estime et un grand respect pour son père spirituel, Padre Pio. Un jour, après s’être confessé auprès de lui, Padre Pio lui dit :
« Quand tu rentreras chez toi, j’aimerais que tu fondes un groupe de prière. »
Frank accepta, bien qu’il n’eût aucune idée de ce qu’était réellement un groupe de prière ni comment en organiser un. Il imaginait qu’il s’agissait simplement de personnes se réunissant pour prier ensemble, mais il n’en était pas sûr. Alors qu’il réfléchissait à la demande de Padre Pio, ce dernier ajouta :
« Ne t’en fais pas trop. Tu y arriveras. »
Pour Frank, c’était comme si Padre Pio avait lu dans ses pensées.
Aussitôt sorti du monastère, Frank se rendit au bureau administratif de l’hôpital de Padre Pio, la Maison du Soulagement de la Souffrance. C’était le siège des Groupes de Prière à travers le monde. Il expliqua tout à Signorina Lucibelli, responsable des lieux. Elle lui répondit que Padre Pio avait l’habitude de confier ce genre de missions :
« Ne vous inquiétez pas, dit-elle, Padre Pio sait ce qu’il fait. S’il vous a confié cette tâche, il vous aidera aussi à la réaliser. »
Elle lui remit une brochure détaillant le fonctionnement des Groupes de Prière. Frank apprit qu’il devait obtenir l’autorisation de l’évêque de son diocèse et trouver un prêtre comme directeur spirituel.
De retour à Vittorio Veneto, Frank prit rendez-vous avec l’évêque Albino Luciani. L’évêque écouta attentivement, mais refusa l’autorisation. Il expliqua que certains incidents malheureux s’étaient produits dans le passé avec des groupes de prière – des comportements inappropriés avaient causé de sérieux problèmes dans le diocèse. Malgré les efforts de Frank pour le convaincre, la décision resta inchangée. Déçu, Frank rentra chez lui, redoutant de devoir annoncer la nouvelle à Padre Pio.
Deux mois plus tard, le 18 août, Frank retourna à San Giovanni Rotondo et put parler à nouveau avec Padre Pio dans la chambre Saint-François.
« Que dois-je faire, Padre ? » demanda-t-il. « J’ai essayé de créer un groupe de prière, mais l’évêque Luciani refuse. »
Padre Pio répondit calmement :
« Ne fais rien. Il t’appellera. Tu auras l’autorisation du Patriarche. »
Frank s’étonna : « Le Patriarche n’a rien à voir avec cela. C’est l’évêque de Venise. Mon évêque, c’est Albino Luciani. C’est lui qui doit donner l’autorisation. »
Padre Pio répéta simplement :
« Comme je te l’ai dit, tu auras l’autorisation du Patriarche. »
Padre Pio mourut le 23 septembre 1968. Près d’un an plus tard, Frank reçut un appel du diocèse de Vittorio Veneto : l’évêque Luciani voulait lui parler. À sa grande surprise, le prélat montra un véritable intérêt pour les Groupes de Prière. Il demanda à Frank de lui envoyer toute la documentation nécessaire. Si tout était conforme, il donnerait son accord.
À la fin de l’entretien, alors que l’évêque le raccompagnait, Frank tenta de lui raconter sa conversation passée avec Padre Pio. Mais l’évêque le coupa, probablement pressé par d’autres obligations.
Peu après, Frank apprit à la radio que l’évêque Albino Luciani avait été nommé Patriarche de Venise– un titre prestigieux. Il se souvint aussitôt des mots prophétiques de Padre Pio :
« Tu auras l’autorisation du Patriarche. »
Plus tard, Frank revit l’évêque Luciani, désormais Patriarche, qui lui dit :
« Je vous donne l’autorisation de former un Groupe de Prière. Mais je vous en supplie, ne laissez pas les membres devenir fanatiques. »
Il pensait sûrement aux problèmes du passé. Frank le rassura.
Avant de partir, Frank déclara en souriant :
« Votre Éminence, si vous m’aviez laissé finir mon histoire à propos de Padre Pio, vous auriez su que vous alliez devenir Patriarche de Venise. »
Luciani lui sourit, sans dire un mot.
Le 5 mars 1973, le pape Paul VI éleva Luciani au rang de Cardinal. Le 26 août 1978, il fut élu pape et choisit le nom de Jean-Paul Ier, en l’honneur de Jean XXIII et Paul VI.
Le 20 septembre 1978, Frank eut la chance de saluer Jean-Paul Ier au Vatican, avec 150 pèlerins de Vittorio Veneto en route vers San Giovanni Rotondo pour le 10e anniversaire de la mort de Padre Pio.
Connu comme le « pape au sourire » pour sa bonté et son humanité, Jean-Paul Ier fut proclamé Serviteur de Dieu le 23 novembre 2003 – première étape vers sa canonisation.
